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DANS LA COUR SUPRÊME DE LA NOUVELLE-ÉCOSSE

[R. c. Doucet, 2003NSSCF256]

Date: 20031201

Docket: S.AM. No. 3841

                                                                                                                               Registry: Amherst

Entre:         

 

                                                    Donnie Doucet

                                                                                                                Appelant

 

                                                           - et -

 

 

                                               Sa Majesté La Reine                                              

      Intimée

 

 

JUGEMENT

 

 

 

Devant:                 L’honorable juge Allan P. Boudreau

 

Lieu:                     À Port Hood, Nouvelle-Écosse

 

Date:           Le 16 septembre 2002 (les derniers mémoires ont été

reçus en décembre 2002)

 

Décision:               Le 1er décembre 2003      

 

Avocats:               Me Réjean Aucoin, de la part de l’appelant

Me Lloyd Lombard, de la part de l’intimée

 

 

 

 

 

 


 

Introduction

[1]     Cette affaire aborde les droits linguistiques des citoyens du Canada. L’appelant, Donnie Doucet, s’est fait arrêter le 8 mars 1998 à Salem, Nouvelle-Écosse, sur la route transcanadienne, dans la région d’Amherst. L’agent de la Gendarmerie royale du Canada (G.R.C.) qui a arrêté M. Doucet ne parlait pas français. En tout temps pendant l’incident, l’agent de la G.R.C. s’est adressé à M. Doucet exclusivement en anglais, et ce dernier s’est adressé à l’agent exclusivement en français. Par la suite, M. Doucet fut accusé d’excès de vitesse. M. Doucet prétend que ses droits linguistiques constitutionnels ont été violés au cours de cet incident.

Nouvelle question présentée en appel

[2]     L’appelant allègue que ses droits constitutionnels prévus par l’alinéa  11(b) de la Charte Canadienne des droits et libertés (Charte) ont été violés. Il prétend qu’il n’a pas eu un procès, un jugement et un prononcé de sentence dans un délai raisonnable. Cette question fut soulevée pour la première fois en appel.

Les faits

[3]     L’appelant est un citoyen du Canada de langue maternelle française. Il  s’est


 fait arrêter par la G.R.C. le 8 mars 1998 à Salem, en Nouvelle-Écosse, sur la route transcanadienne, dans la région d’Amherst. L’agent de la G.R.C. qui a arrêté  l’appelant était le constable Hannon du détachement d’Amherst. L’agent Hannon a chronométré le véhicule que conduisait l’appelant à une vitesse de 131 km/h dans une zone de 110 km/h. L’agent Hannon a demandé à l’appelant de produire son permis de conduire, la preuve d’assurance et de l’immatriculation du véhicule. L’appelant lui a remis certains des documents demandés. Par la suite, l’agent a dressé une contravention pour excès de vitesse en vertu du paragraphe 106 (2) de la loi Motor Vehicle Act, R.S.N.S. 1989 c. 293 et a remis celle-ci à l’appelant en lui expliquant les procédures à suivre. En tout temps pendant l’incident, l’appelant s’est adressé à l’agent Hannon uniquement en français et celui-ci s’est adressé à l’appelant uniquement en anglais. Il paraît que l’agent Hannon était un anglophone unilingue. Aussi, il paraît que l’appelant n’a fait aucune demande explicite pour des services en français et il n’a pas indiqué à l’agent qu’il ne comprenait pas l’anglais. L’appelant a avoué très bien comprendre l’anglais.

Les faits concernant le délai

[4]     1) La dénonciation comprise dans la sommation a été remise à l’appelant le 8 mars 1998.           

2) Le 30 mars 1998, l’appelant, alors représenté par Me Roger Bilodeau, demande un procès en français.

3) Lors de la première comparution le 8 avril 1998, la date du 28 août 1998 est

fixée pour un procès en français.

4) Le 28 août 1998, les parties comparaissent une première fois devant le juge Prince de la Cour provinciale de la Nouvelle-Écosse. Les parties s’entendent pour soumettre des faits conjoints et pour présenter des mémoires écrits concernant les questions de droit.

5) Les parties n’arrivent pas à s’entrendre sur des faits communs. Une date de procès est fixée au 23 avril 1999.

6) Le procès est reporté au 20 août 1999, de consentement .        

7) Le 5 août 1999, Me Aucoin entre au dossier pour l’appelant du fait de la nomination de Me Bilodeau comme sous-ministre de la Justice du Nouveau-Brunswick. Me Aucoin ne pouvant être présent le 20 août, la date du procès est fixée au 5 novembre 1999.


8) Le procès en première instance a lieu le 5 novembre 1999 devant l’honorable juge Robert M.J. Prince de la Cour provinciale de la Nouvelle-Écosse.

Le juge demande des mémoires aux parties sur les questions de droit.

9) Le mémoire de l’appelant est déposé le 29 janvier 2000 et celui de la

 couronne est déposé le 14 février 2000.

10) Le jugement est rendu le 15 juillet 2001. Le juge rejette les défenses de l’appelant et le déclare coupable de l’infraction d’excès de vitesse.

11) La peine est prononcée le 30 novembre 2001.    

12) L’avis d’appel est deposé le 7 decembre 2001.

Motifs d’appel

[5]     Les motifs d’appel deposés le 7 decembre 2001 étaient les suivants:

1) L’honorable juge de première instance a commis une erreur de droit en déclarant que les dispositions de l’article 20 de la Charte ne s’appliquent pas à la présente affaire et que les droits linguistiques de l’accusé n’ont pas été respectés en l’espèce.

2) L’honorable juge de première instance a commis une erreur de droit en interprétant de façon erronée le paragraphe 20 (1) de la Charte en refusant de l’appliquer à la G.R.C. lorsque’elle offre un service en vertu d’un contrat avec une province.

3) L’honorable juge de première instance a commis une erreur de droit en déclarant que l’article 20 de la Charte n’est pas applicable à la situation d’un policier qui procède à une arrestation et remet une contravention en vertu d’une loi provinciale.

4) L’honorable juge de première instance a commis une erreur de droit dans son jugement en ne tenant pas compte que la G.R.C. est une institution fédérale, quelleque soit la nature du service qu’elle rend, et conséquemment soumise à la Charte.         


5) L’honorable juge de première instance a commis une erreur de droit et de

fait en appliquant erronément la notion d’offre active en décidant que le fait d’avoir choisi le français comme langue de communication n’était pas l’équivalent d’une demande de service dans sa langue.

6) L’honorable juge de première instance a commis une erreur de droit et de fait en décidant que la demande de service de l’appelant n’était pas une demande importante au sens de la loi.

7) Que les droits de l’appelant prévus au paragraphe 20(1) de la Charte ont été brimés car l’appelant n’a pas pu se prévaloir de ses droits d’obtenir une communication dans sa langue tels que garanti par la Charte.

8) Que les droits de l’appelant prévus à l’alinéa 11 (b) de la Charte ont été brimés  car l’appelant n’a pas été jugé dans un délai raisonnable.

9) Tous autres motifs qui pourraient ressortir lors de l’audience.

[6]     Au cours de l’appel, les motifs furent réduits aux suivants:

1) L’honorable juge de première instance a erré en droit en concluant que l’article 20 de la Charte n’est pas applicable à la G.R.C. en l’espèce, même lorsque celle-ci agit à contrat avec la province de la Nouvelle-Écosse.

2) L’honorable juge de première instance a commis une erreur de droit et de

fait en décidant que la demande de service de l’appelant n’était pas une demande importante au sens de la loi.

3) L’honorable juge de première instance a commis une erreur de droit et de fait en appliquant la notion d’offre active et en déclarant que le fait d’avoir choisi le français comme langue de communication n’était pas l’équivalent d’une demande de service dans sa langue. 

4) L’honorable juge de première instance a commis une erreur de droit et de fait en ne concluant pas que les droit liguistiques constitutionnels de l’appelant ont

 


été violés le 8 mars 1998.

5) Le droit de l’appelant à un procès, un jugement et un prononcé de sentence

dans un délai raisonnable prévu à l’alinéa 11(b) de la Charte a été brimé puisque le jugement et la sentence ont été prononcés plus de trois ans après la remise de la contravention.

6) L’appelant a droit à l’arrêt des procédures comme remède “convenable et juste”.

Analyse - le délai

[7]     Je vais premièrement trancher la question soulevée par le motif d’appel numéro cinq. L’appelant prétend que son droit à un procès, un jugement et un prononcé de sentence dans un délai raisonnable prévu à l’alinéa 11 (b) de la Charte a été violé.

[8]     Cette question ne fut pas soulevée au procès car une grande partie du temps

écoulé ressort de la délibération du juge de première instance et le temps du  jugement au  prononcé de la sentence.

[9]     L’audience du présent appel eut lieu devant moi à Port Hood, Nouvelle-Écosse le 16 septembre 2002. À la fin de l’audience, j’ai demandé à chacune des parties de déposer un mémoire au sujet du délai raisonnable. Cette question n’avait pas été discutée en aucun détail dans les premiers mémoires des parties. Ces derniers mémoires ont été reçus en novembre et décembre 2002.

[10]    Étant donné que l’appelant n’a pas soulevé la question de délai raisonnable devant le juge de première instance, la couronne prétend qu’il n’est pas maintenant  possible de présenter cette question en appel. Le juge n’a aucunement tranché cette question car celle-ci n’avait pas été abordée devant lui. Il n’est donc pas possible de porter cette question en appel. C’est une défense toute nouvelle. Cependant, les  motifs avancés par l’appelant à ce sujet n’existaient pas tous au moment du procès. L’appelant se base fortement sur la période après l’audience devant le juge de première instance pour justifier ses arguments.


[11]    J’accepte qu’il n’est strictement pas possible de porter cette question en appel en l’espèce. À mon avis, l’appelant aurait du présenter cette question ou ce motif sous forme de requête préalable à cet appel. Néanmoins, je vais considérer ce motif d’appel  comme une requête ou une question préalable au présent appel et non  comme un motif d’appel. Procéder en cette manière ne cause aucun préjudice aux parties. Ni à la couronne, ni à l’appelant. Les faits qui sont pertinents à cette question ne sont

aucunement en dispute. De plus, les parties ont pleinement présentés leurs arguments sur cette question dans leurs mémoires supplémentaires.

[12]    Je vais donc trancher cette question comme une requête préalable au présent appel et je vais continuer avec l’analyse de ce motif.

[13]    L’analyse d’un délai doit se faire selon les critères énoncés par la Cour suprême du Canada dans l’affaire R. c. Morin, [1992] 1 R.C.S. 771. Ces critères sont les suivants:

1) la longueur du délai;

2) la renonciation par l’accusé à invoquer certaines périodes;

3) les raisons du délai, notamment:

a) les délais inhérents à la nature de l’affaire

b) les actes de l’accusé

c) les actes de la couronne

d) les limites des ressources institutionnelles;

4) le préjudice subi par l’accusé.

 

1) La longueur du délai

[14]    Il n’y a aucune circonstance qui pourrait suggérer que la longueur du délai en l’espèce ne devrait pas inclure la période jusqu’au prononcé de la peine. Donç les critères énoncés dans Morin s’appliquent du 8 mars 1998 au 30 novembre 2001, une durée de plus de 44 mois.

 

 

 


2) La renonciation par l’accusé à certaines périodes

[15]    L’appelant soumet qu’il n’a renoncé à aucune période et j’accepte que cela est vrai. Cependant, l’appelant a accepté les dates choisies sans aucune protestation. Aussi, l’appelant a demandé de reporter quelques dates pour lui permettre de monter une contestation en vertu de la Charte et pour que son nouvel avocat soit prêt et présent.

3) Les raisons du délai

a) Les délais inhérents à l’affaire

[16]    L’appelant soumet qu’un délai de 44 mois n’est pas raisonnable pour un procès sommaire dans une accusation d’excès de vitesse et que cette affaire n’était pas plus complexe que d’autres et que la période écoulée dépasse très largement le délai inhérent à ce type d’affaire. Cet argument aurait plus de portée si on n’avait pas ajouté une contestation en vertu de la Charte. L’affaire en l’espèce est devenue très compliquée suite à cette contestation. Donc, il n’est pas exact de classer cette affaire comme une affaire typique. Aussi, dans la province de la Nouvelle-Écosse, il faut s’attendre à un certain délai quand un accusé demande un procès en français; cependant, il y a maintenant assez de juges francophones et bilingues pour qu’un délai causé par une telle demande ne soit pas significatif.

b) Les gestes de l’accusé

[17]L’intimée prétend qu’en choisissant un procès en français, l’appelant a renoncé,

en partie, à son droit à un procès dans un délai raisonnable tel que garanti par la Charte. Même si la province de la Nouvelle-Écosse n’est pas une province bilingue, il existe des ressources suffisantes comme je viens de le mentioner, et des délais déraisonnables ne sont pas justifiés. Les procès en français ont droit aux mêmes priorités que d’autres et les ressources requises pour éviter de tels délais sont disponibles et elles devraient leur être accordées.


[18]    La date du 28 août 1998 avait été choisi au départ pour l’audience, mais ensuite reportée pour permettre aux parties de s’entendre sur des faits communs. Par suite du défaut de s’entendre, une nouvelle date d’audience fut fixée au 23 avril 1999, puis reportée au 20 août 1999, de consentement. Cependant, c’est l’appelant qui a demandé le report de cette dernière date au 5 novembre 1999 pour permettre à son nouvel avocat, Me Aucoin, d’étudier le dossier et d’être présent à l’audience. Même si ces délais n’étaient pas la faute de l’appelant, ce dernier délai émanait  néanmoins de l’appelant et n’est donc pas attribuable à la couronne.

[19]    L’audience a eu lieu le 5 novembre 1999, mais les derniers mémoires des parties n’ont pas été soumis avant le 14 février 2000. Ceci terminait le procès devant le juge de première instance, sauf pour rendre jugement et prononcer la peine.

[20]    Donc, l’appelant a demandé de reporter des dates à quelques reprises.  D’abord, pour lui permettre de monter une contestation en vertu de la Charte; ensuite, pour que son nouvel avocat soit prêt et présent à l’audience. Un délai de 4 mois peut être attribuée à l’appelant, excluant les 12 mois de négociations infructueuses au sujet des faits communs.

c) Les gestes de la couronne

[21]    La couronne n’a demandé aucun ajournement et n’a contesté aucune date proposée par l’appelant ou la cour. Donc, l’intimée n’a causé aucun délai.

Les gestes conjoints de l’accusé et de la couronne

[22]    Il y a eu un délai de 12 mois entre le 28 août 1998 (la première date fixée pour l’audience) et le 20 août 1999 (la troisième date fixée pour l’audience). Durant cette période, les parties ont abordé des négociations infructueuses pour tenter de s’entendre sur des faits communs aux fins d’éviter une audience avec preuve et de procéder par mémoires. À mon avis, aucune portion de cette période n’est attribuable à l’une ou à l’autre des parties.


d) Les limites des ressources institutionnelles

[23]    Il n’y a aucune preuve à l’effet que le délai ait été causé de manière significative par un manque de ressources institutionnelles. Des ressources adéquates

étaient disponsibles en tout temps aux parties. La province emploie un certain nombre de fonctionaires bilingues qui travaillent avec les tribunaux. Il y a aussi quelques juges francophones et bilingues. Même si ces juges ne sont pas  assignés uniquement à des procès en français ou bilingues, ils se déplacent pour présider à telle procès quand le besoin se manifeste. Donc, je ne suis pas convaincu que les limites des ressources institutionnelles aient eu un impact significatif sur la question du délai.

(f) Les autres raisons

[24]    Une grande partie du délai a été occasionnée lors de la période de déliberation du juge de première instance. Le dernier mémoire a été déposé le 14 février 2000  et le jugement rendu le 15 juillet 2001, soit une période de 17 mois. Il n’y a aucune explication au sujet du délai de 4 mois et demi pour se rendre à l’imposition de la peine le 30 novembre 2001. Je présume que cette dernière date a été fixée de consentement.  Est-il raisonnable de prendre 17 mois pour rendre jugement dans l’espèce? Je pense que non, mais on comprend. Ce n’est pas souvent que les juges de la Nouvelle-Écosse doivent rédiger des jugement en français. Par conséquent, ça leur prend plus longtemps. En plus de cela, le dossier pose des questions assez importantes et difficiles. Est-ce que ces éléments justifient des délais déraisonnables? À mon avis, non, mais c’est une explication.

[25]    En tout, l’appelant ne peut être déclaré responsable que pour un délai d’environ 4 mois. En plus, la période de 12 mois de négociations au sujet des faits communs devrait être soustraite du délai total de 44 mois. Cela nous laisse avec un délai de 28 mois, qui demeure inexpliqué, dans lequel on compte la période de 17 mois de déliberation du juge de première instance. Est-ce que cette période inexpliquée de 28 mois est raisonnable en l’espèce? Je pense que non.


4) Le préjudice subi par l’accusé

[26]    La jurisprudence au sujet du préjudice n’est pas constante. L’arrêt R. c. Morin, [1992] 1 R.C.S. 771 indique que le fardeau de prouver l’absence de préjudice repose sur la couronne. Même si Morin était souvent cité comme énoncant qu’il existe une présomption selon laquelle un simple écoulement de temps cause un préjudice à l’accusé dans les cas de délais très longs, il est maintenant généralement reconnu qu’un préjudice réel doit être prouvé. Sans un préjudice réel, on n’arrive pas à rencontrer les critères nécessaires pour ordonner un arrêt des procédures. En l’espèce, il y a un manque de preuve portant sur la nature du préjudice subi par l’appelant. Le fait est que l’appelant a choisi de monter une cause type au sujet des droits linguistiques des citoyens qui voyagent sur les routes en Nouvelle-Écosse. Il ne me paraît pas que l’accusé ait subi quelque préjudice en poursuivant la revendication de

ses droits linguistiques. Son permis de conduire n’a pas été révoqué durant ces

procédures et il n’a pas eu à payer son amende. Il paraît  qu’il a même reçu des fonds

publics pour monter cette contestation. Enfin, je ne puis conclure que l’accusé ait subi aucun préjudice.

Conclusion sur la question du délai


[27]    À mon avis, un délai de 28 mois n’est pas raisonnable pour un procès sommaire en français, en Nouvelle-Écosse, même si celle-ci n’est pas une province bilingue. Je comprends qu’il puisse prendre plus longtemps à compléter un procès en français dans cette province, pour les raisons déja énoncées, mais celles-ci ne consitutent pas une excuse pour justifier des délais déraisonnables. On doit être plus vigilant. Par exemple, moi même je n’aurais pas dû prendre 12 mois pour rendre ce jugement, peu importe les circonstances. Enfin, nous devons faire mieux. Je suis convaincu que les droits de l’appelant à être jugé dans un délai raisonnable, tels que garantis par l’alinéa 11 (b) de la Charte, ont été violés. Néanmoins, je ne suis pas convaincu qu’un arrêt des procédures soit un remède convenable et juste en l’espèce. L’appelant n’a subi aucun préjudice significatif, ce qui fait obstacle aux critères necéssaires pour ordonner un arrêt des procédures. Ce dossier  n’est pas un des cas les plus évidents ou manifestes. Je suis d’avis de rejeter la demande de l’accusé pour un arrêt des procédures fondé sur un délai déraisonnable. Donc, je vais passer à l’analyse des motifs d’appel relatifs aux droits linguistiques prévus au paragraphe 20 (1) de la Charte.

Les droits linguistiques en vertu de la Charte

[28]    L’appelant prétend que ses droits linguistiques tels que prévus au paragraphe 20 (1) de la Charte ont été violés. Ce paragraphe stipule:

(1) Le public a, au Canada, droit à l’emploi du français ou

de l’anglais pour communiquer avec le siège ou l’adminis-

tration centrale des institutions du Parlement ou du gouverne-

ment du Canada ou pour en recevoir les services; il a le même

droit à l’égard de tout autre bureau de ces institutions là où,

selon le cas:

a) l’emploi du français ou de l’anglais fait l’objet

d’une demande importante;

b) l’emploi du français et de l’anglais se justifie

par la vocation du bureau.

 

Le premier motif d’appel à ce sujet est le suivant:

1) L’honorable juge de première instance a erré en droit en concluant que l’article 20 de la Charte n’est pas applicable à la G.R.C. en l’espèce, même lorsque celle-ci agit à contrat avec la province de la Nouvelle-Écosse.


[29]    Que la G.R.C. soit une institution du Parlement ou du gouvernement du Canada n’est aucunement remis en question. Elle est constituée en vertu de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, L.R.C. 1985, chap. R-10. La G.R.C. est une force policière nationale. Est-ce que la G.R.C. perd son statut fédéral quand elle remplit toutes les fonctions des agents de la paix sous contrat avec une province ou quand elle fait  respecter les lois provinciales? Dans cette province, la G.R.C. fait respecter toutes les lois, fédérales ou autres, dans les circonscriptions où elle est embauchée à contrat par le gouvernement provincial. Le juge de première instance a conclu que “l’acte de signifier le billet (d’excès de vitesse) n’était pas dans cette circonstance une activité de l’état fédéral.” Il n’y a aucun doute que les membres de la G.R.C. sont mandatés de faire respecter les lois provinciales aussi que les lois fédérales. L’article 18 de la loi sur la G.R.C. stipule:

18. Sous réserve des ordres du commissaire, les membres qui

ont qualité d’agent de la paix sont tenus:

a) de remplir toutes les fonctions des agents de la paix, en

ce qui concerne le maintien de la paix, la prévention du

crime et des infractions aux lois fédérales et à celles en

vigueur dans la province où ils peuvent être employés,

ainsi que l’arrestation des criminels, des contrevenants et

des autres personnes pouvant être légalement mises sous

garde;

b) d’exécuter tous les mandats – ainsi que les obligations

et services s’y rattachant – qui peuvent, aux termes de la

présente loi, des autres lois fédérales ou de celles en vigueur

dans une province, légalement l’être par des agents de la

paix”;

(soulignés ajoutés)

 

[30]    Le juge Richard de la Cour du Banc de la Reine du Nouveau-Brunswick a décidé  dans R. c. Gautreau, [1989]; 101 R.N.B. 2ed 1, que la livraison d’un billet de contravention à la Loi sur les véhicules à moteur est une communication par un membre d’une force policière à un individu. Au Nouveau-Brunswick, le public a droit de communiquer avec tous les bureaux gouvernementaux dans les deux langues officielles. En Nouvelle-Écosse, un individu détient des droits semblables, mais seulement s’il peut se qualifier tel que prévu au paragraphe 20 (1) de la Charte. Il reste à voir si ce paragraphe de la Charte s’applique en l’espèce.


[31]    À mon avis, les membres de la G.R.C. ne perdent pas leur statut fédéral quand ils agissent sous contrat avec une province ou qu’ils font respecter les lois provinciales. C’est leur mandat en vertu de la loi sur la G.R.C. et ils ne font que le remplir. Donc, c’est encore un service d’une institution fédérale. Le paragraphe 20 (1) de la loi sur la G.R.C. supporte cette conclusion:

20 (1) “Avec l’agrément du gouverneur en conseil, le ministre

peut conclure, avec le gouvernement d’une province, des

arrangements pour l’utilisation de la gendarmerie, ou d’un

élément de celle-ci, en vue de l’administration de la justice

dans la province et de mise en oeuvre des lois qui y sont en

vigeur.”

 

[32]    À mon avis, un contrat avec une province ne change rien à l’égard du statut de la G.R.C. Elle demeure une institution fédérale. Juger autrement permettrait à la G.R.C. d’éviter ses obligations linguistiques envers les citoyens, telles que garanties par la Charte. Cela ne s’accorderait certainement pas avec l’objet des droits

linguistiques constitutionnels. Le juge Bastarache s’est prononcé sur cette question dans R. c. Beaulac, [1999] 1 R.C.S. 768 quand il stipule au paragraphe 25:

“Les droits linguistiques doivent dans tous les cas être inter-

prétés en fonction de leur objet, de façon compatible avec le

maintien et l’épanouissement des collectivités de langue

officielle au Canada; voir Renvoi relatif à la Loi sur les écoles

publiques (Man.), précité, a la p. 850.”

 

[33]    Il n’est pas permis aux institutions fédérales d’éviter leurs responsabilités linguistiques constitutionnelles par l’entremise de contrats ou d’autres arrangements qui transférent ou délèguent certaines de leurs fonctions. Cela est énoncé dans l’arrêt Canada (Commissaire aux Langues Officielles) c. Canada (Ministère de la Justice),

[2001] c.F.P.I. 239, aux paragraphes 182 et 183:

“[182] Je n’ai donc pas d’hésitation à conclure que les mesures

prises par la partie défenderesse en application de la LC et les

ententes intervenues entre la partie défenderesse et le gouverne-

ment de l’Ontario et les ententes municipales subséquentes ne

protègent pas adéquatement et en totalité les droits linguistiques

quasi-constitutionnels prévus par les dispositions des articles

530 et 530.1 du Code criminel et par la partie IV de la LLO.

 

 

 


[183] La violation des droits linguistiques prévus aux articles

530 et 530.1 du Code criminel et à la partie IV de la LLO,

constitue également une violation des droits prévus aux articles

16 a 20 de la Charte.

                    (Soulignés ajoutés)

 

À mon avis, le paragraphe 20 (1) de la Charte s’applique en l’espèce. Juger autrement pourrait avoir l’effet illogique qu’un accusé aurait des droits linguistiques constitutionnels s’il est arrêté pour une infraction fédérale alors qu’il n’en aurait pas s’il est au même moment arrêté pour une infraction provinciale. Les gestes de la G.R.C., agissant comme agence de police en faisant respecter des lois provinciales, sont des gestes d’une institution fédérale, sous contrat avec une province

ou non, et les exigences du paragraphe 20 (1) de la Charte s’y appliquent. La G.R.C. a un protocole pour fournir des services dans les deux langues officielles si un besoin se présente, même sur les routes.

[34]    Je vais donc passer à l’analyse des circonstances en l’espèce pour décider si les droits linguistiques constitutionnels de l’appelant ont été violés.

[35]    Je vais maintenant examiner le motif d’appel numéro trois:

3) L’honorable juge de première instance à commis une erreur de droit et de fait

en appliquant la notion d’offre active et en déclarant que le fait d’avoir choisi le

français comme langue de communication n’était pas l’équivalent d’une demande de service dans cette langue.


[36]    Les parties sont d’accord pour reconnaître que l’appelant n’a pas fait une demande spécifique ou explicite à l’agent Hannon pour des services en français. La question à répondre est: est-ce que l’appelant a adressé la parole à l’agent Hannon en français d’une manière suffisante pour que celui-ci comprenne que l’appelant demandait des services en français? L’agent Hannon a témoigné que s’il avait perçu que l’appelant désirait des services en français, il aurait mis en marche le protocole qui existe pour répondre à ces demandes. Il a témoigné qu’il n’a pas perçu une telle demande. Il est évident que le contact direct entre l’appelant et l’agent Hannon était de très courte durée, à peu près 30 secondes la première fois et environ une minute la deuxième fois. La première fois, l’appelant a seulement eu le temps de dire, “Bonjour monsieur”, passer ses documents et l’agent Hannon est retourné à sa voiture de patrouille. L’appelant n’a pas eu la chance de lui adresser la parole plus que cela. Le deuxième contact entre l’appelant et l’agent Hannon se passe lorsque ce dernier a livré le billet d’excès de vitesse à l’appelant. Il paraît que l’agent Hannon n’a aucunement écouté ce que disait l’appelant et il lui a simplement lu les procédures à suivre telles qu’écrites au verso du billet et il est parti. L’appelant a temoigné qu’il a demandé à l’agent Hannon s’il parlait français à cette dernière rencontre. Si cela s’est produit, l’agent Hannon n’en a pas tenu compte. C’est troublant que l’agent Hannon ait temoigné qu’il aurait mis le protocole en marche pour obtenir des services en français pour l’appelant s’il avait perçu que ce dernier ne comprenait pas l’anglais. Si j’étais convaincu que l’agent Hannon était conscient que l’appelant voulait des services en français, le fait que l’agent Hannon était d’avis que l’appelant comprenait l’anglais ne lui fournirait aucune excuse. J’accepte la jurisprudence citée par l’appelant à ce sujet. Cependant, je ne suis pas convaincu que les agents de la G.R.C. qui patrouillent les routes en Nouvelle-Écosse doivent, d’une manière active, faire une enquête pour déterminer si les prévenus désirent des services dans une ou l’autre des langues officielles.

[37]    L’appelant a temoigné qu’il a seulement eu le temps de dire “Bonjour” ou “Bonjour, Monsieur” à l’agent Hannon avant que ce dernier retourne à sa voiture. Il n’a pas eu le temps d’expliquer rien de plus durant cette première rencontre. L’appelant a temoigné à la page 43 de la transcription de l’audience du 5 novembre 1999:

“Parce que...En fait, lorsque je me suis adressé en francais

durant la communication, il était déjà parti à la voiture. Et


lorqu’il est revenu, même si j’avais voulu communiquer

avec lui en français, il ne m’a jamais donné l’occasion de

lui parler le français.”

 

[38]    C’est évident que l’appelant est d’avis que les services en français dans les présentes circonstances devraient être offerts d’une manière agressive ou pro-active. Il a temoigné ainsi à la page 44 de la transcription:

“...le fondement de la cause, ce n’est pas si en fait la personne

a besoin des services mais si les services devraient être livrés

d’une façon obligatoire.”

 

et à la page 47 et la page 48:

 

Q.   Comment est-ce que l’officier peut vous...Comment est

-ce que vous suggérez que l’officier peut vous...répondre à

votre demande s’il ne comprend pas ce que votre demande est?

 

R.   La raison pour laquelle je savais que la G.R.C. avait une

obligation, c’est que durant l’été, je travaille au Parc National,

au Cap-Breton. Et je sais que lorsqu’il y a des préposés qui

sont incapables de parler la langue minoritaire, eux, ont

l’obligation de se trouver quelqu’un qui est compétent dans

cette langue pour adresser le besoin du client.

 

Q.   Ça, ce n’est pas ma question.

 

R.   Mais....

 

Q.   Comment est-ce que vous suggérez que constable

Hannon peut vous répondre en français lorsqu’il ne vous

comprenait pas?

 

R.   Je présumais qu’il était au courant que j’étais francophone.

Et ça, la raison pour laquelle je lui ai donné mon permis qui a

mon nom “Doucet”, je viens de Chéticamp... Puis je présumais

peut-être qu’il pourrait me trouver un service en français, soit

par téléphone ou de communiquer avec quelqu’un pour venir

nous passer un coup de main sur le bord de la route.

 

[39]    Je suis d’accord avec la conclusion du juge de première instance quand il a dit  à la page 5 de son jugement:


“Je suis de l’avis qu’il n’est pas nécessaire pour les membres

de la GRC de signifier aux accusés qu’ils peuvent choisir la

langue de communication.”

[40]    Aussi, je suis incapable de conclure que le juge de première instance a commis une erreur de droit ou de fait quand il a énoncé ce qui suit à la page 6 de son jugement:

“Il est à noter que dans la cause devant moi le défendeur n’a

pas fait de demande spécifique à l’officier de communiquer

en français quand c’était clair que l’officier ne réagissait pas 

au fait que le défendeur a dit “Bonjour Monsieur” quand

l’officier a pris possession des documents. C’est vrai que le

défendeur a témoigné qu’il a continué d’essayer de parler

en français. Par contre, c’est clair que l’officier traitait d’un

événement habituel, l’émission d’un billet pour excès de

vitesse. La transaction entière a duré à peine quelques minutes

et il est à noter que l’officier a dit que s’il avait compris que le

défendeur voulait l’assistance en français il aurait été capable

d’invoquer le protocole pour répondre à cette situation. Il se

peut que c’était simplement une circonstance curieuse où le

défendeur aurait eu recours aux services en français s’il aurait

persisté jusqu’à ce que l’agent Hannon soit conscient qu’une

demande se faisait.”

 

[41]    Cependant, je ne suis pas d’accord qu’un prévenu doive persister en face de l’indifférence d’un agent d’arrestation, mais, à mon avis il en faut plus que ce qu’a présenté l’appelant en l’espèce. Je ne peux pas conclure que le juge de première instance a commis une erreur en déterminant que l’appelant n’avait pas présenté suffisament d’éléments pour établir une demande spécifique ou explicite ou même une demande implicite pour des services en français. Donc, pour cette raison seule, le pourvoi doit être rejeté.

[42]    Au cas où cette conclusion soit écartée, je vais trancher la question de demande importante. Je vais maintenant passer au motif d’appel numéro deux, qui est le suivant:


2) L’honorable juge de première instance a commis une erreur de droit et de fait en décidant que la demande de service de l’appelant n’était pas une demande importante au sens de la loi.

[43]    Les alinéas 20 (1) a) et b) de la Charte stipulent que le droit de communiquer dans une ou l’autre des langues officielles dépend des critères suivants:

a) l’emploi du français ou de l’anglais fait l’objet d’une

demande importante;

b) l’emploi du français et de l’anglais se justifie par la

vocation du bureau.

[44]    L’appelant soumet que la “vocation” des bureaux de la G.R.C. telle  qu’exprimée à l’article 18 de la Loi sur la G.R.C., commande l’utilisation de l’anglais ou du français, au besoin, lorsqu’il s’agit de patrouiller la route transcanadienne. L’appelant n’a pas présenté de preuve qui démontre que les besoins sont différents sur la route transcanadienne par rappport aux autres routes. Enfin, l’appelant demande à la cour de prendre connaissance d’office que la “vocation” de la G.R.C. est différente sur la route transcanadienne et que les besoins dans les deux langues officielles seraient  différents. Comme je l’ai déjà dit, l’appelant n’a présenté aucune preuve pour justifier que la vocation de la G.R.C. quand elle patrouille la route transcanadienne peut justifier l’emploi du français et de l’anglais en l’espèce. Je ne suis pas convaincu que je devrais prendre connaissance d’office que cela est le cas.

[45]    L’appelant prétend que la vocation de la G.R.C. quand elle patrouille la route transcanadienne dans la région d’Amherst exige qu’au moins le bureau d’Amherst de


la G.R.C. doit assurer l’usage des deux langues officielles. La raison soumise pour supporter cette proposition est que la région d’Amherst est le point d’entrée principale entre le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse. Donc, l’appelant demande à la cour de prendre connaissance d’office qu’un nombre significatif de francophones du Nouveau-Brunswick et du Québec utilisent la route transcanadienne dans la région d’Amherst. À mon avis, cet argument est le même qu’on demande à la  cour d’accepter en vertu  de l’alinéa 20 (1) (b) de la Charte au sujet d’une demande importante.

[46]    Le juge de première instance a declaré que la preuve en l’espèce était insuffisante pour démontrer que l’emploi du français..._fait l’objet d’une demande importante.” Il s’est prononcé comme suit:

“Même si j’ai tort par rapport à cette question je suis de

l’avis que la preuve devant moi ne prouve pas qu’il y

existe une “demande importante” pour un service dans

les deux langues...”

 

[47]    L’appelant prétend que la population francophone des provinces maritimes et

du Québec, telle que publiée par Statistique Canada, est suffisante pour que la cour prenne connaissance d’office d’une demande importante pour l’emploi du français par la G.R.C. lorqu’elle patrouille la route transcanadienne dans la région d’Amherst en Nouvelle-Écosse. Est-ce que le nombre est plus élevé dans la région  d’Amherst que dans la région de Truro, Antigonish, ou Cap Breton? On ne le sait pas. Est-ce que ça devrait être différent pour les gens qui voyagent sur l’autoroute entre Truro et Halifax? La demande pourrait être semblable sur toutes les grande routes en Nouvelle-Écosse. À mon avis, le fait que les circonstances en l’espèce se sont produites dans la région d’Amherst n’est pas très significatif.

[48]    Enfin, je ne suis pas convaincu que le juge de première instance a commis une erreur quand il a énoncé que l’appelant n’avait pas prouvé que l’emploi du français

faisait l’objet d’une demande importante en l’espèce. Je soupçonne que le français pourrait faire l’objet d’une demande importante sur la route transcanadienne dans la région d’Amherst, comme dans d’autres régions des provinces maritimes. Je pense que c’est pour cette raison que la G.R.C. a établi un protocole pour répondre à telle demande. Néanmoins, le fardeau d’établir ce fait incombe à l’appelant et, à mon avis, la preuve est insuffisante pour que l’appelant s’acquitte de ce fardeau. Donc, je passe au motif d’appel numéro quatre.


[49]    4) L’honorable juge de première instance a commis une erreur de droit en ne

concluant pas que les droits linguistiques constitutionnels de l’appelant ont été violés le 8 mars 1998.

[50]    Pour les motifs déjà énoncés dans ce jugement, je ne puis conclure que les droits linguistiques constitutionnels de l’appelant ont été violés le 8 mars 1998. La G.R.C. a un protocole en vigueur pour répondre aux besoins linguistiques des citoyens canadiens dans les deux langues officielles quand les circonstances l’exigent. Ce protocole n’a pas été mis en marche, pour les raisons déjà enoncées et cela ne constitue pas une violation des droits linguistiques de l’appelant en l’espèce.

[51]    En conclusion, le pourvoi est rejeté.

 

J.

 

 

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